Le Quai d’Orsay retire son habilitation à l’œuvre d’adoption Rayon de soleil de l’enfant étranger

9 February 2023

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Le Quai d’Orsay retire son habilitation à l’œuvre d’adoption Rayon de soleil de l’enfant étranger

L’association, l’un des plus importants organismes français d’adoption d’enfants à l’international, s’est vu retirer ses habilitations en décembre 2022. Depuis plusieurs années, sa probité était remise en cause.

Par Morgane Le Cam

Publié aujourd’hui à 08h33, mis à jour à 08h35

Temps deLecture 2 min.

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Rapport d’adaptation d’une enfant adoptée en France, fourni par l’association Rayon de soleil de l’enfant étranger à son père. A Bamako, au Mali, le 30 septembre 2021. NICOLAS REMENE / LE PICTORIUM / LE PICTORIUM/MAXPPP

La nouvelle est « un début de soulagement », après des années passées à alerter l’opinion publique sur les dérives présumées opérées par l’organisme d’adoption français Rayon de soleil de l’enfant étranger (RDSEE) dans plusieurs pays. Fin janvier, Marie Marre, fondatrice du collectif des Adoptés français du Mali et elle-même adoptée par l’entremise de RDSEE à Bamako, découvre ce qu’elle appelle de ses vœux depuis sa mise au jour, en 2018, de nombreuses zones d’ombre entourant son adoption : le Quai d’Orsay a abrogé l’intégralité des habilitations délivrées à l’organisme.

Rayon de soleil, qui pouvait jusqu’ici encore procéder à des adoptions dans cinq pays (Bulgarie, Chili, Chine, Corée du Sud et Inde) au nom de couples français, est désormais interdite d’exercer en tant qu’intermédiaire. L’arrêté ministériel qui le confirme, daté du 21 décembre 2022, était passé sous les radars. Les raisons motivant cette mise aux arrêts globale – une sanction rare – n’y sont pas spécifiées.

« Le ministère, en prenant cette décision, a estimé que les attaques répétées contre RDSEE dans certains médias ne permettaient pas à l’OAA [organisme autorisé pour l’adoption] d’assurer pleinement sa mission », a précisé, pour sa part, l’association sur son site Internet. Le 23 novembre 2022, Le Monde avait publié le fruit de cinq années d’enquête sur les adoptions irrégulières présumées opérées par cette association, un des plus importants organismes français à l’origine de l’adoption de plus de 7 000 enfants à travers le monde depuis la fin des années 1970.

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Au Mali mais aussi en Centrafrique, à Madagascar, en Haïti, au Pérou et en Roumanie, de multiples sources allant des archives diplomatiques de l’Etat aux Français adoptés, parents biologiques comme adoptifs en passant par d’anciens responsables de l’association, ont mis en cause la probité de Rayon de soleil. Toutes ont accusé l’association d’avoir menti pour faire adopter des enfants qui n’auraient pas dû l’être. Contacté avant la parution de l’article, le Quai d’Orsay avait alors confirmé qu’il y avait « certainement eu des pratiques illicites » au sein de l’organisme, avant de préciser qu’il considérait désormais celui-ci comme un « interlocuteur fiable dans la façon dont il travaille aujourd’hui ».

L’« obstacle » des délais de prescription

De nouveaux éléments ont-ils depuis permis au ministère d’étayer les informations sur les pratiques illicites présumées décrites par Le Monde, justifiant ainsi l’interdiction globale d’exercer posée ? Contacté, le Quai d’Orsay s’est contenté de préciser, comme l’avait fait Rayon de soleil avant lui, que « les mises en cause répétées » de l’organisme « pour des faits anciens » ne lui permettaient pas d’exercer normalement.

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Sylvie Cyprien, la présidente de RDSEE, précise que l’association compte contester cette décision, considérant que « le motif retenu pour justifier le retrait d’habilitation n’entre pas dans la liste des motifs légalement prévus par les dispositions du code de l’action sociale et des familles, et porte atteinte à la présomption d’innocence ».

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Depuis l’automne 2021, la justice s’intéresse à cette affaire. Le 6 septembre, le tribunal de Paris a en effet réclamé l’ouverture d’une enquête pour « recel d’escroquerie », à la suite d’une plainte, déposée en juin 2020 par neuf Français adoptés au Mali, contre l’association et son ancienne correspondante à Bamako.

Selon nos informations, un juge a récemment été nommé mais, depuis, l’instruction se heurte au problème de la prescription, les faits reprochés par les plaignants remontant aux années 1990. Or, la plupart des Français adoptés ne découvrent les conditions de leur adoption qu’une fois devenus adultes. « L’Etat devrait légiférer pour que les délais de prescription ne soient plus des obstacles pour les personnes adoptées souhaitant se tourner vers la justice », préconise Marie Marre, elle-même plaignante dans l’affaire Rayon de soleil.

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La trentenaire espère que le retrait d’habilitation posé par le Quai d’Orsay contre l’organisme sera suivi d’un accompagnement de l’Etat envers les Français adoptés par son entremise et souhaitant rechercher leurs origines. Car pour l’heure, des dizaines d’entre eux se lancent en solitaire dans une quête de vérité dans laquelle les impasses peuvent être nombreuses sans aide de l’Etat, garant de la probité des organismes agréés au moment de ces adoptions aux contours parfois obscurs.

Morgane Le Cam

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